
Car de nos jours toutes les histoires sont bâclées,
Entendez ici la promesse d’un récit
Complètement sorti des sentiers tout tracés,
Incitant à la réflexion sur notre vie.
En réalité cette idée est saugrenue,
Sous ce bel emballage se trouve une arnaque,
Travestie avec talent par dix-sept macaques.
Une fois pour toute soyez donc prévenus,
Nous sommes aussi futés que des œufs de Pâques.
Préparez-vous pour cette fable hors du commun :
Invoquant un phœnix, des femmes et même un chien,
Lorgnant sur des paroles insensées et absurdes,
Oubliant jusqu’à l’éthique et la cohérence
Touchant à l’humour, le mystère et la démence,
Enivrant même jusqu’au lecteur le plus rude.



Comme tout explorateur confirmé, je fus
Hameçonné un matin par un cri chantant.
Attiré par cette dissonance velue,
Par curiosité je m’y rendais en courant.
Intrigué par ce son venant d’ailleurs et qui
Transgressait ce lourd silence encore absolu,
Remplir ce vide de sens et de compagnie,
Eclata comme étant une idée convenue.
Un chien à deux têtes, voilà tout le spectacle,
Nul n’aurait pensé cela possible, un miracle!
Une tête rappelant bien celle d’une oie,
N’en déplaise à l’autre qui, semblant s’en moquer,
Entendait sans doute à peine mes phrases trissées.
Pour les différencier la seule information
Résidait sur un collier empreint de “JT”.
Enclin dès lors à un très certain abandon
Mon choix s’est donc orienté vers son adoption.
Initié alors à cette entité duale,
Entreprendre la poursuite de mon chemin
Ressemblait pour lors à une quête sans fin
Egayée par un compagnon très peu banal.
Rapidement sa présence m’a affecté,
Enivrant ma condition selon ses humeurs.
Nul ne saurait expliquer ses effets pourtant.
Comprenez que la vue de l’oie m’enchantait mais
O combien l’autre me consternait à toute heure.
Ne jugez pas, j’ai besoin d’eux deux cependant,
Tout ce voyage ne saurait se faire seul :
Replié sur nous même, avancer est ardu.
Errons donc ensemble plus loin vers l’inconnu…


Laissé presque seul dans ce territoire hostile,
Endurer cette tare me rendait docile…
D’un coup ! Une forêt m’est apparue au matin.
Il m’incombait de me diriger vers là-bas…
Le possible mirage me semblait à perpète les oies,
Egayant fortement en partie mon voisin !
Mais je m’en suis étonnement rapproché vite,
Mettant en joie cette moitié de chien et moi
En pensant pouvoir trouver quelqu’un qui l’habite…
D’ordinaire les déserts suivent les forêts,
Emmenées par l’esprit d’un brillant château, mais,
L’ordre des choses ici semble être différent,
Appelant à l’évolution, comme un aimant.
Bien décidé à percer ces mystères feuillus,
Activement je pénétrais dans l’inconnu.
La forêt était douce et mesurée par endroits.
La forêt était néanmoins survoltée des fois.
A l’instar de cette unique et blanche lumière,
Dans ce pays luttent les couleurs froides, et austères.
En fin de compte, j’aime ce type d’aventure !
Fatigué, j’admettais avoir mes jambes molles.
Ornant un tronc singulier j’aperçus en l’air :
Révoltée, une branche, sinueuse tel un col
Et une autre, saillante semblable à une lame,
Souriante, courbée comme les fesses d’une femme.
Tout émerveillé je grimpais donc les chercher.
Intentant de les prendre j’admirais la cime :
En haut de ces troncs s’entremêlaient les feuillages,
Ramifiés de nature et bras d’une toile intime.
Enfin je comprends des énigmes, des paysages.

A présent équipé de bâtons pour marcher,
L’heure est enfin à la pause bien méritée.
Alarmé cependant par un autre bruit soudain
Presque tremblant je me levais, cherchant sa source.
Oyant ce son fort et fluide, je repris ma course,
Usant de mon chien pour me frayer un chemin.
Rapidement je vis la lisière et m’arrêtai,
Sous mes yeux et les aboiements, l’étonnement,
Une rivière venait d’encercler la forêt !
Impossible à éviter, sans contournements…
Toutefois à ma droite émergeaient des rochers
Exposant des prises, sûres à l’inverse du reste
Dompté par la pure désorganisation.
Enclin à survivre sans céder au frisson
La traversée s’est faite en direction de l’est.
Escorté à la nage par mon chien toujours morne,
Traverser la Willamette vivant et indemne
Ravive, selon moi et mon compagnon très piorne,
Au grand air la beauté de ces flots de Salem.
Noyé d’admiration j’observais l’horizon :
Guidé par les méandres, descendant le courant,
Éreinté par l’émotion, combattant les vents,
Il se dessinait ma nouvelle direction.
Le fleuve rencontrait plus bas des affluents,
Le lit grossissait et devenait plus violent !
Utilement, une barque gisait au bord,
Me donnant un pratique moyen de transport.
In extremis je voguais jusqu’à une grotte…
Nappé dans la nuit noire, j’avançais à l’aveugle
A l’exception d’une lumière maigriotte.
Tout s’accéléra, s’illumina, et d’un coup !
Impensable ! Du vide et une immense cascade
Ouvrant sur un extérieur semblant infini !
Nul ne saurait décrire telle poésie…



Une seconde de plus et je n’étais plus,
Noyé par ces longs flots tombant dans l’inconnu.
Rares sont réussis les sauts désespérés et
Encore sous le choc nous regagnions la rive.
Garder sa sérénité n’était pas aisé,
Aussi dur même, que de calmer un bateau ivre.
Rude fut la sortie de ces eaux qui bientôt,
Disparaissaient pour ne laisser qu’un filet d’eau.
Tout était devenu calme sans crier gare.
Insensé. Cette cascade avait disparue !
Même un tyran assoiffé n’aurait pas tout bu !
Il ne restait que ma face mouillée et du marc.
Du silence, sorti un son à peine audible,
Effaçant un lien, m’ouvrant au monde sensible.
Sur d’être à présent libre de mes futurs choix,
Une envie supplanta alors toutes mes peurs :
Rejoindre le bord de ce précipice hurleur.
Lentement je marchais, m’aidant de la paroi,
Et je fus bouche bée devant telle grandeur.
Nombre de formes étranges tournoyaient dans l’air,
Oubliez le désert, place au relief de la terre !
Une fenêtre opaque venait de s’ouvrir,
Vivifiant mon esprit d’une faim insatiable.
Emmené par une légère brise apyre,
Assailli par ces courants ardents inflammables,
Un fil d’Ariane s’étendait à l’infini
Magnifié sur ses bords par moult broderies.
On devinait que le suivre était sans retour.
Non-rassuré, j’envisageais un demi-tour
Démoli par le torrent qui revenait.
Enclin à devoir sauter, je m’y accrochai.